Archive for the 'Non classé' Category

« A Hard Rain’s A-Gonna Fall » de Bob Dylan

En septembre 1962, j’ai commencé ma dernière année d’école primaire. Je ne savais pas à quoi m’attendre quand je commencerais l’école secondaire l’année suivante – j’étais un garçon isolé et innocent, mais j’aimais la vie tranquille que j’avais dans ma ville natale bien-aimée. Puis, le mois suivant, la paix du monde a été emportée par des hommes sans visage de pays étrangers, l’un voisin, l’autre à l’autre moitié du monde, qui ont décidé qu’ils seraient ceux qui détermineraient le sort du monde.

Le 14 octobre 1962, un avion espion américain a pris des photos de missiles balistiques soviétiques installés à Cuba. Équipés de têtes nucléaires, les missiles pouvaient atteindre des cibles aux États-Unis et au Canada. Le président américain John F. Kennedy a rejeté les appels de ses conseillers militaires à lancer des frappes aériennes contre les sites de missiles. Plutot, il a monté un blocus naval immédiat de Cuba. La crise des missiles cubains a duré 13 jours et les deux superpuissances atomiques du monde se sont rapprochées plus que jamais de la guerre nucléaire. L’impasse a pris fin le 28 octobre avec l’aide de diplomates des Nations Unies, en particulier le Secrétaire général U Thant. Le premier ministre soviétique Nikita Khrouchtchev a accepté de démanteler et de retirer les missiles soviétiques, en échange de la promesse de Kennedy de ne pas envahir Cuba. Bien que la crise ait été désamorcée, l’armée américaine est restée en état d’alerte pendant trois semaines supplémentaires alors qu’elle surveillait l’enlèvement des missiles. Dans le cadre de la résolution, Kennedy a également secrètement promis de retirer de la Turquie des missiles nucléaires américains de portée intermédiaire Jupiter, un accord qui n’a été rendu public qu’à la fin des années 1980.

Au Canada, le premier ministre Diefenbaker avait remporté l’élection de 1958 avec la plus grande marge de l’histoire du Canada, mais sa réaction hésitante à la crise des missiles cubains a entraîné la chute de son régime. Au lendemain de la crise, les États-Unis ont accusé le gouvernement Diefenbaker de mentir et d’éviter ses devoirs militaires. Le ministre de la Défense nationale, Douglas Harkness, démissionne en février 1963 pour protester contre l’opposition de Diefenbaker à l’installation d’ogives nucléaires américaines au Canada. Cette démission a précipité la scission du gouvernement conservateur et Diefenbaker a perdu contre le Parti libéral de Lester B. Pearson aux élections de 1963.

Pour un jeune de 12 ans, c’était un réveil très, très douloureux. J’étais outré que des gens complètement insignifiants à ma vie pouvaient encore décider de son sort. J’ai développé une haine profonde pour la politique des nations belligérantes. À ce jour, j’espère que tous les belligérants rencontreront la mort qu’ils infligent aux autres. Chaque fois que j’entends parler de conflits mortels dans le monde, je repense au fait que les belligérants, sur les deux fronts de tout conflit, réduisent leur nombre dans le patrimoine génétique.

Dylan à ses débuts avec la chanteuse Joan Baez

En 1962, je n’étais certainement pas la seule personne qui portait de la haine et de l’indignation dans son cœur pour la guerre et la belligérance. Cette année-là, Bob Dylan lance « The Freewheelin’ Bob Dylan », un album qui comprend la chanson « A Hard Rain’s A-Gonna Fall » et d’autres « chansons de protestation », inspirées en partie par Woodie Guthrie (1912-1967) et influencée par Pete Seeger (1919-2014). La chanson de Dylan est modelée sur « Lord Randall », introduisant chaque verset avec des variantes des lignes d’introduction de cette ballade frontalière anglo-écossaise du 17ème siècle. La chanson est souvent interprétée comme une réaction à la crise des missiles cubains, mais Dylan a lui-même dénoncé cette simplification excesive puisqu’il l’avait lui-même interprétée publiquement un mois avant la crise.

Richard et Roch

Les pièces de Dylan à ses débuts venaient tous d’une époque où le renouveau folk qui prenait d’assaut la ville de New York se diffusait aussi en Amérique du nord et finalement, le monde. Ce phénomène précédait tous les avancements technologiques de notre vie. Invariablement, les pièces étaient enregistrées par Dylan seul, avec sa voix, sa guitare et son harmonica. Notre arrangement est beaucoup plus lent et moderne et, dans un esprit de brièveté, ne contient pas toutes les paroles de l’enregistrement original.  

Richard Séguin – voix, guitares acoustiques 6 cordes et 12 cordes, guitares électriques, programmation MIDI (orgue)
Roch Tassé – tom basse

Pour écouter la pièce, cliquez sur le titre ci-bas.

A Hard Rain’s A-Gonna Fall

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur « A Hard Rain’s A-Gonna Fall » de Bob Dylan

La culture musicale de Rockland, 1950-1975 / « Long Black Veil »

50e anniversaire de mariage de mes grand-parents, Joseph Séguin et Rose Délima Blanchette, 1955. De G à D, Jean-Guy Séguin, Marielle Séguin, Gabriel Séguin, ma cousine Gisèle Labrèche et mon cousin Réjean Labrèche

50e anniversaire de mariage de mes grand-parents, Joseph Séguin et Rose Délima Blanchette, 1955. De G à D, Jean-Guy Séguin, Marielle Séguin, Gabriel Séguin, ma cousine Gisèle Labrèche et mon cousin Réjean Labrèche

Aussi loin que je me souvienne, ma ville natale de Rockland fut remplie de musiciens amateurs, en ce sens que personne ne les payait pour faire de la musique. Ils jouaient parce qu’ils aimaient jouer. Cependant, ils étaient talentueux. J’ai toujours pensé que la musique joué simplement par amour est aussi pure que cette forme d’art peut l’être.

The Happy Valley Boys à l'hôtel Windsor. De G à D, Gerry Sharp, Paul Labelle, Gabriel Séguin

The Happy Valley Boy à l’hôtel Windsor. De G à D, Gerry Sharp, Paul Labelle, Gabriel Séguin

Quand j’étais petit, il y avait toujours de la musique dans notre maison. Mon frère Gabriel a formé un groupe appelé The Happy Valley Boys avec ses amis Paul Labelle et Gerry Sharp. Ils jouaient souvent à l’hôtel Windsor, au coin de Metcalfe et Queen à Ottawa, et ont même joué jusqu’à Maniwaki. Ma famille élargie les suivait partout. Paul et Gerry étaient toujours chez nous quand Gabriel vivait, des frères ces trois-là. Ils mangeaient sous notre toit, dormaient sous notre toit et mes parents les aimaient comme les leurs.

Un de nos musiciens des plus célèbres est Gaëtan « Pete » Danis, un excellent guitariste qui a joué pendant des décennies derrière Bob et Marie King, un duo très populaire, surtout au Québec et dans l’est de l’Ontario. Le groupe était complété par Hughie Desmond à la contrebasse électrique et Gilles St-Laurent à la batterie. Gilles a joué avec The Happy Valley Boys à l’occasion.

Michel Rondeau de Rockland est un trompettiste et gradué du Conservatoire de Musique du Québec, qui a composé plus de 200 oeuvres, y compris 35 symphonies, et il a transcrit et arrangé plus de 900 oeuvres de chorale et d’orgue ainsi que des pièces pour différentes combinaisons d’instruments et de voix. Quand j’étais jeune homme, je me rendais souvent chez Michel avec ma guitare pour l’accompagner pendant qu’il pratiquaient des pièces de trompette populaires à l’époque. Il aimait particulièrement les pièces de Herb Alpert & The Tijuana Brass et de Henry Mancini.

La fanfare de Rockland

La fanfare de Rockland

Michel Rondeau, comme plusieurs hommes et garçons de Rockland, est aussi passé par la Fanfare de Rockland. Mon frère Robert et moi y avons paricipé pour quelques années. Un ami de Robert et membre de la fanfare, Jacques Drury, vennait chez nous pour pratiquer son saxophone pendant que mon frère jouait sa guitare.

La famille Lalonde de Rockland s’est formé un orchestre composé de Pat Pilon, chanteur et guitariste, Aurèle Lalonde, proclamé le meilleur violoneux de l’est du Canada, son frère « Tit-Bus » à la contrebasse, Gaston Leroux à la batterie et un excellent joueur de « steel guitar » de Bourget dont le nom est perdu dans l’histoire.

À Rockland, il y avait toujours quelqu’un pour aider un jeune à apprendre la musique. Roch Tassé, excellent batteur et ami de long temps qui collabore souvent avec moi pour produire les pièces présentées sur ce site, était souvent visité par son oncle Ubald Pilon, un violonneux, accompagné de ses amis musiciens. Pat Pilon y était ainsi que Gaston Leroux, qui a enseigné la batterie à Roch. Son oncle Ubald lui a aussi enseigné les bases de la guitare. La famille Pilon de Rockland avait aussi formé un orchestre dirigé par Fernand Pilon, qui avait un commerce de livraison d’huile à chauffage. Son jeune frère Denis Pilon était à la batterie.

Un groupe nommé « The Royals » avait été formé pour être l’orchestre en résidence de l’hôtel King George à Rockland, mais ils ont aussi joué jusqu’à Thurso, Qc. Les membres étaient André « Gus » Gosselin, un excellent batteur et chanteur, Denis Tessier, un superbe guitariste qui m’a beaucoup influencé à mes débuts, Jean-Pierre Ménard, guitare et Michel Chrétien, un autre ancien élève de la fanfare de Rockland, au saxophone.

Gerry Sharp au sous-sol chez nous, circa 1957.

Gerry Sharp au sous-sol chez nous, circa 1957.

La famille Sharp était aussi très active en musique. Gerry, qui jouait avec mon frère Gabriel, est devenu enseignant de guitare classique et a travaillé longtemps chez Gervais, un magasin de pièces électroniques à Ottawa. Son frère Arthur jouait de la guitare et chantait, souvent accompagné de mon grand ami Gilles « Blaze » Dessaint (1946-2019). Quand ils jouaient en personne, Richard Rochon était leur batteur.

The SynComs. De g à d, Côme Boucher, Richard Houle, Robert Aquin, Robert Séguin et Tom Butterworth

The SynComs. De G à D, Côme Boucher, Richard Houle, Robert Aquin, Robert Séguin et Tom Butterworth

En 1963, mon frère Robert a formé un orchestre à l’école secondaire avec Côme Boucher, Richard Houle, Robert « Bob » Aquin et Tom Butterworth. C’était l’aube de l’ère des télécommunications et du programme American Syncom. Syncom 2, lancé par NASA en 1963, fut le premier satellite de communication géosynchrone au monde, ce qui signifie que le sattelite accomplissait une orbite chaque jour, tout comme la Terre. Soudainement, le monde est devenu beaucoup plus petit. Pas surprenant, le groupe a pris le nom de The Syncoms.

Tom et Richard à La chandelle. Assis dans les coulisses, Roch Tassé

Tom et Richard à La chandelle. Assis dans les coulisses, Roch Tassé

J’ai rejoint le groupe de mon frère Robert en 1965. Robert adorait le groupe britannique Gerry and The Pacemakers et a appelé son groupe Robbie and The Trensetters, puis The Trendsetters et enfin, tout simplement The Trend. Le groupe était complété par Tom Butterworth à la guitare et Denis Sabourin, un batteur de Hammond. Par la suite, Tom et moi avons joué avec André « Gus » Gosselin et on se présentait aussi en duo à La chandelle, un rendez-vous pour les jeunes au sous-sol de l’Église de Rockland. Roch Tassé a dirigé plusieurs des activités à La chandelle.

En 1966, une chanson nommée « Elusive Butterfly » fut un gros hit pour le chanteur Bob Lind et un groupe s’est formé avec le nom The Elusive Butterflies, auparavant appelé The Rubies. Le personnel comprennait Don Boudria, voix et guitare, Denis Bergeron, guitare, André Parisien et Pierre Castonguay, contrebasse électrique et Pierre Lemay à la batterie. En 1984, Don Boudria a été élu comme représentant des Libéraux pour la circonscription de Glengarry-Prescott-Russell en Ontario. Il a occupé différents postes dans le Cabinet de Jean Chrétien à son arrivée au pouvoir en 1993, dont leader à la Chambre et ministre des Travaux publics.

Richard et Alcide Dupuis

Richard et Alcide Dupuis

J’ai eu la chance de jouer à maintes reprises avec Alcide Dupuis, un violoneux de Rockland. Un oncle d’Alcide lui avait montré le violon mais absolument rien d’autre! Alcide ne connaissait ni note, ni clef et gardait un répertoire varié et très sophistiqué dans sa tête. Le problème était de récupérer une pièce de sa mémoire! Il commençait en grattant les cordes de son violon avec son archet, cherchant pour une mélodie incertaine. Alcide « steppait » aussi et ses pieds essayaient de trouver le rhythme qui allait avec la mélodie. Il s’approchait graduellement de son but, le trouvait, et décollait comme un 747, tout coudes, archet et pieds! C’était une des transformations des plus spectaculaires dont j’ai été témoin de ma vie. Comme vous pouvez voir de la photo, on s’amusait beaucoup.

À cette époque, je travaillais et j’ai pu m’acheter une guitare acoustique, une guitare électrique (les deux des Gibson) et un banjo Fender. Tom a acheté sa première guitare steel et ces instruments nous ont permis de nous diversifier dans différents genres que nous aimions. Finalement, Richard Houle et Pierre Lemay, un batteur local, ont rejoint Tom et moi dans un groupe qui n’a jamais eu de nom.

En 1971, mon frère Robert a acheté un magnétophone Sony, le sommet de la technologie d’enregistrement à l’époque. Mon frère nous a enregistré en jouant d’abord au sous-sol de notre maison et, en 1972, au sous-sol de la maison de Pierre Lemay. Il n’y a pas eu de suite aux enregistrements et les bandes ont été stockées dans divers endroits et oublié pendant de plus de 30 ans.

Au sous-sol du centre culturel La Ste Famille de Rockland. De G à D, Manu, Richard Séguin, Alain Gratton, Jean-Pierre Béland

Au sous-sol du centre culturel La Ste Famille de Rockland. De G à D, Manu, Richard Séguin, Alain Gratton, Jean-Pierre Béland

Par la suite, Tom a formé un groupe nommé Beach dans lequel figurait aussi Pierre Chénier (1953-2021) à la guitare, Richard Houle à la contrebasse électrique et son cousin John Houle à la batterie. Pour ma part, je composais des airs pour la guitare et le banjo. Mon ami Jean-Pierre Béland, un expert en productions audiovisuelles, m’a demandé de composer la bande sonore pour un diaporama qu’ il réalisait. Jean-Pierre m’a enregistré dans la sacristie de l’Église de Rockland où les réverbérations naturelles sont saisissantes. Les résultats ont été très bien reçus et, en 1975, Jean-Pierre nous a conduit, Roch et moi, à un petit studio de Montréal appelé Bobinason pour réaliser nos premiers enregistrements commerciaux.

Vers 2008, Richard Houle m’a téléphoné pour me dire qu’il avait trouvé les bandes d’enregistrement de 1972 dans une boîte dans son sous-sol. Richard est venu me rendre visite, m’a remis les bandes, que j’ai ensuite données à mon frère Robert. Robert avait toujours ce vieux magnétophone Sony et il fonctionnait toujours! Grâce à son équipement numérique de l’époque, il a pu transférer nos enregistrements originaux des bandes à des supports audio numériques. Les bandes, alors âgées de plus de 40 ans, s’étaient détériorées et les enregistrements originaux étaient affectés, mais certains étaient meilleurs que les autres. L’un des meilleurs du lot est notre interprétation de « Long Black Veil. » Comment Robert a réussi à enregistrer quatre instruments et quatre voix avec seulement deux micros je ne saurai jamais.

« Long Black Veil » a été composé par Danny Dill (1924‑2008) et Marijohn Wilkin (1920‑2006), deux auteurs-compositeurs professionnels, et a été enregistré pour la première fois par William Orville « Lefty » Frizzell (1928‑1975) en 1959. Frizell est connu comme l’un des stylistes de chant country les plus influents de tous les temps. Il a été intronisé au Country Music Hall of Fame ainsi qu’au Songwriters Hall of Fame en 1982.

« Long Black Veil » est devenu un standard et a été couvert par une variété d’artistes dans les styles country, folk et rock, notamment par Johnny Cash et The Band.

Cet enregistrement, perdu et retrouvé, est dédié à la mémoire de Richard Houle (1947-2013).

Richard Séguin – voix, guitare acoustique
Tom Butterworth – voix, guitare électrique
Richard Houle – voix, contrebasse électrique
Pierre Lemay – batterie
Robert Séguin – voix, enregistrement analogique, transfert numérique

Pour entendre la pièce, cliquez sur le titre ci-bas.

Long Black Veil 1972

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur La culture musicale de Rockland, 1950-1975 / « Long Black Veil »

« It Takes a Lot To Laugh, It Takes a Train To Cry » de Bob Dylan

Richard

Richard

Quand j’étais jeune, tous les habitants de Rockland entendaient les trains de marchandises qui roulaient la nuit de l’autre côté de la rivière des Outaouais. Les trains suivaient la ligne Thurso, Masson-Angers, Gatineau, le cri de deuil lointain de leurs sifflets qui résonnaient dans l’obscurité. Aucun autre son ressemble à celui-là.

Quand j’ai commencé à jouer de la musique à l’âge de 13 ans, tout le monde avait une chanson de train. Johnny Cash en avait plusieurs, comme « Folsom Prison Blues » et « Hey Porter ». Les chansons de train allaient du sombre profond de « Mystery Train » de Junior Parker, de la tristesse plaintive de « Waiting For A Train » de Jimmie Rodgers, du funk irrésistible de « Night Train » de James Brown, à la mélodie joyeuse de « Freight Train » d’Elizabeth Cotton.

South Indian 1907

South Indian 1907

Au début du 20e siècle, les lignes de la compagnie ferroviaire Grand Tronc croisaient l’est ontarien entre Ottawa et Montréal. South Indian était une des stations et son emplacement est maintenant le village de Limoges. Il y avait aussi une station à North Indian, qui est devenue le village d’Hammond, non loin de Rockland.

Ma chanson de train préférée de tous les temps est sûrement « Click Clack » de Don Van Vliet (1941-2010), le capitaine Beefheart lui-même, l’homme qui avait une dent contre cette société. « Click Clack » est tout mouvement, plein de trains qui vont et viennent, et une fille qui « menace de descendre à la Nouvelle Orléans pour se perdre et se retrouver. » La chanson de train la plus impressionnante dont j’aie été témoin est « The Rail Song » d’Adrian Belew (né en 1949), une chanson magnifiquement nostalgique de son amour pour les trains. La pièce fut publiée en 1983 sur l’album « Twang Bar King. » Adrian Belew a travaillé avec certains des plus grands noms de la musique, y compris Frank Zappa, David Bowie, Talking Heads et King Crimson. La guitare de Belew sonne comme tout au monde, y compris une guitare. Maître de la conception d’instruments et du multimédia, il a collaboré avec la compagnie Parker Guitars pour concevoir sa guitare signature Parker Fly. Personne n’a un répertoire de sons de guitare plus étonnants qu’Adrian Belew.

Roch

Roch

J’ai vu Belew et son groupe, The Bears, à la fin des années 1980 dans un petit club de Hull, au Québec. À la fin d’une de leurs chansons, comme s’il y avait une panne de courant, tout le club est soudainement devenu noir, tout sauf une minuscule tache de lumière venant de la scène. Puis, nous entendions un murmure lointain. Lentement, la tache de lumière s’est rapprochée et le bruissement est progressivement devenu plus fort, des roues de train sur des voies éloignées. On entendait un sifflement de train lointain quand le club a commençé à trembler, le train s’approchait, le bruissement maintenant assourdissant, les lumières qui clignotaient et s’éteignaient lorsque le train franchissait un passage à niveau et balayait le club. Les patrons se cachaient sous les tables pour se mettre à l’abri pendant que tout l’endroit tremblait. Avec une transition parfaite, les lumières de la maison se sont allumées et Belew et The Bears se sont lancés dans « The Rail Song. » C’était le genre d’intro qu’on n’oublie jamais.

Bob Dylan a composé sa chanson de train, « It Takes a Lot To Laugh, It Takes a Train to Cry », en 1965 pour l’album « Highway 61 Revisited.» Elle a toujours été l’une de mes chansons préférées. Elle a aussi été interprétée par Steven Stills, Leon Russell, Taj Mahal et Lucinda Williams, entre autres.

Richard Séguin – voix, guitare acoustique, guitare électrique, contrebasse électrique
Roch Tassé – batterie

Pour entendre la pièce, cliquez sur le titre ci-bas.

It Takes a Lot To Laugh, It Takes a Train To Cry

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur « It Takes a Lot To Laugh, It Takes a Train To Cry » de Bob Dylan

« C’mon Everybody » d’Eddie Cochran

J’ai grandi dans une maisonnée de neuf personnes couvrant trois générations. J’ai toujours été entouré d’amour, de mon grand-père, mon père, ma mère, mes frères et mes sœurs. Mon frère Robert était le plus près de moi en âge et il était, et est toujours, un superbe grand frère. Ma sœur Marielle, de 10 ans mon aînée, était ma gardienne et remplaçait ma mère lorsque son temps était entièrement consacré aux besoins quotidiens de neuf personnes.

Gabriel

Gabriel

Et puis il y avait mon frère Gabriel, de 14 ans mon aîné. Vous auriez pensé qu’un jeune homme aurait d’autres choses à l’esprit que le petit monde d’un enfant, mais Gabriel n’était jamais ce à quoi vous vous attendiez. Bien sûr, il avait des copines, travaillait comme fonctionnaire, faisait du ski nautique et jouait du piano avec son petit combo mais il trouvait toujours le temps d’être attentif, ce qui était sa nature, et pas seulement avec moi mais avec tout le monde. Quand il a vu que j’étais captivé par la beauté incompréhensible de la musique à l’âge de cinq ans, il m’a pris à part, m’a montré comment prendre soin de sa collection de disques et m’a appris à utiliser notre gramophone. Gabriel m’a permis de jouer ses disques quand je voulais, comme un adulte. Et il a ouvert la porte à mon histoire d’amour avec la musique, le plus grand cadeau que j’ai jamais reçu, après son amour.

Eddie Cochran

Eddie Cochran

La collection de disques de mon frère était sans pareille. Tous les artistes qui ont façonné la première vague du rock n’ roll dans les années 50 étaient présents : Chuck Berry, Little Richard, Elvis Presley, Jerry Lee Lewis, Ivory Joe Hunter, The Everley Brothers, Buddy Holly, The Coasters. Quand j’avais 8 ans, un nouvel artiste est entré dans sa collection : Eddie Cochran. Mon frère a acheté trois de ses plus grandes réussites, « Summertime Blues », « C’mon Everybody » et « Somethin’ Else ». Cochran était un jeune rock-and-roller qui jouait toujours une magnifique guitare électrique Gretsch 6120 avec un tailpiece Bigsby. J’ai choisi de mettre en vedette « C’mon Everybody » de Cochran, joué très près de son enregistrement original de 1958.

Comme Chuck Berry, Cochran parlait de la frustration et de la rébellion des adolescents en chansons qui sont encore admirées à ce jour. L’ascension de Cochran à la célébrité ne fut rien de moins que fulgurante. Il a appris la musique très jeune et a réalisé ses premiers enregistrements à l’âge de 17 ans. La même année, il fut présenté dans le film d’Hollywood « The Girl Can’t Help It », interprétant une autre de ses chansons à succès, « Twenty Flight Rock ».

Roch

Roch

Au début de 1959, deux amis de Cochran, Buddy Holly et Richie Valens, ainsi que le Big Bopper (J.P. Richardson), ont été tués dans un accident d’avion pendant une tournée. Cochran fut très secoué par leur mort, et il a développé une prémonition morbide qu’il mourrait jeune lui aussi. Peu après leur mort, il a enregistré la chanson « Three Stars » en guise d’hommage. Il était impatient d’abandonner la vie sur la route et de passer son temps en studio à faire de la musique, réduisant ainsi le risque de subir un accident mortel similaire en tournée. Des responsabilités financières, cependant, ont exigé qu’il continue à s’exécuter en personne, et ont conduit à une tournée du Royaume-Uni en 1960. Cochran était en tournée de Angleterre quand lui et son collègue artiste Gene Vincent voyageaient en taxi vers Londres. En plus de Cochran et Vincent, les autres passagers dans le véhicule étaient Sharon Sheeley, une auteure-compositrice de 20 ans qui était aussi la fiancée de Cochran à l’époque, Patrick Tompkins (le directeur de tournée, 29 ans) et George Martin (le chauffeur de taxi, 19 ans). Vers minuit, Martin a perdu le contrôle du véhicule, qui s’est écrasé sur un lampadaire en béton. Au moment de l’impact, Cochran (qui était assis au centre de la banquette arrière) s’est jeté sur Sheeley pour la protéger. La force de la collision a ouvert la porte arrière gauche du passager et Cochran a été éjecté du véhicule, subissant un violent traumatisme crânien. La route était sèche et le temps était beau, mais on a déterminé plus tard que le véhicule roulait à une vitesse excessive. Les occupants du véhicule ont tous été transportés à l’hôpital communautaire de Chippenham, puis transférés à l’hôpital St Martin de Bath. Cochran n’a jamais repris conscience et est mort à 16 h 10 le lendemain, le dimanche de Pâques. Il avait 21 ans. Sheeley a subi des blessures au dos et à la cuisse, Vincent a subi une fracture de la clavicule et de graves blessures aux jambes, et Tompkins a subi des blessures au visage et une fracture de la base du crâne. Martin n’a pas subi de blessures importantes.

Linda

Linda

Entre les tragédies qui ont frappé Buddy Holly et Eddie Cochran, ma famille a connu l’une des siennes lorsque mon frère Gabriel s’est noyé accidentellement le 28 juin 1959, à l’âge de 23 ans. On appelle la mort de Buddy Holly le jour où la musique est morte mais, pour moi, la musique est morte avec mon frère. Cependant, ce que mon frère m’a donné n’est jamais mort et, quatre ans après sa mort, j’ai mis la main sur ma première guitare.

Photo d’Eddie Cochran (domaine publique), page Facebook Eddie Cochran – Singer

Richard Séguin – voix, guitare acoustique, guitare électrique, mandoline, contrebasse électrique, percussion
Roch Tassé et Linda Challes – percussion

Pour entendre la chanson, cliquez sur le lien ci-bas.

C’mon Everybody

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur « C’mon Everybody » d’Eddie Cochran

Carl Wilson joue « Du monde en ville »

Carl avec Elliott et Noémie

Carl avec Elliott et Noémie

Il y a environ 20 ans, j’ai reçu un colis inattendu par la poste. Il s’agissait d’un CD de deux guitaristes québécois, Carl Wilson et Richard Trahan, qui jouaient des duos de chansons de leurs compositeurs préférés. Deux de mes propres compositions, tirées de mes premiers enregistrements à la fin des années 1970, figuraient sur le CD. Il semble que Carl et Richard T. avaient aiguisé leurs compétences en écoutant les duos que j’avais enregistrés à l’époque avec mon ami Marc Beneteau.

Richard Trahan

Richard Trahan

Comme vous pouvez l’imaginer, c’était un immense honneur pour moi. Carl m’a rendu visite à Vanier plus tard et nous sommes amis depuis. Carl vit à Terrebonne, au Québec, avec son fils Elliott et sa fille Noémie. Richard T. a rencontré Birgit, une fille allemande, dans l’ouest canadien et l’a suivie jusqu’en Allemagne! Ils sont mariés et ont quatre filles, Ulrike, Julia, Nathalie et Isabelle. Carl et Richard T. sont toujours très actifs en musique, comme tous les enfants de Richard T., en particulier Isabelle, qui compose et joue sa propre musique, publiée en vidéos sur YouTube.

Carl et Richard 2006

Carl et Richard 2006

Il y a quelques jours, Carl m’a encore récompensé avec une nouvelle interprétation vidéo de ma composition « Du monde en ville », un enregistrement de 1978 sur lequel j’étais accompagné de mon bon ami Roch Tassé sur les congas. Roch est toujours un contributeur régulier sur ce site. Le titre de cette pièce vient de ces vendredis soirs dans ma ville natale de Rockland, quand les gens de tous les petits villages avoisinants des comtés de Prescott-Russell venaient en ville faire leurs courses, ou voir un film au Théatre Cartier, ou prendre un bon repas au restaurant Castel. Un moment merveilleux de ma vie qui vit toujours dans cette pièce.

C’est très réconfortant pour moi d’entendre Carl et Richard T. jouer la musique qui les inspire. Nous sommes toujours en contact via Facebook et je suis toujours heureux d’être témoin des entreprises musicales de ces deux excellents guitaristes. Voici Carl et son interprétation vidéo de « Du monde en ville. » Pour entendre la pièce, cliquez sur le titre ci-bas.

Du monde en ville

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur Carl Wilson joue « Du monde en ville »

« Universal Soldier » de Buffy Sainte-Marie

Buffy Sainte-Marie

Buffy Sainte-Marie

Buffy Sainte-Marie, CC (née Beverly Sainte-Marie le 20 février 1941) est une chanteuse-compositrice autochtone canado-américaine (nation crie Piapot), musicienne, éducatrice et militante sociale. Tout en travaillant dans ces domaines, son travail s’est concentré sur les problèmes auxquels font face les peuples autochtones des Amériques.

En 1983, elle est devenue la première Amérindienne à remporter un Oscar lorsque sa chanson « Up Where We Belong », coécrite avec Jack Nitzsche et Will Jennings pour le film « An Officer and a Gentleman », a remporté l’Oscar de la meilleure chanson originale aux 55e Oscars. La chanson a également remporté les prix Golden Globe et BAFTA de la meilleure chanson originale la même année.

En 1997, elle a fondé le Cradle Board Teaching Project, un programme éducatif consacré à une meilleure compréhension des Amérindiens. Elle a été intronisée au Panthéon de la musique canadienne en 1995, a été nommée Officier de l’Ordre du Canada en 1997 et a reçu un doctorat honorifique de nombreuses universités canadiennes.

Lorsqu’elle avait deux ou trois ans, elle a été enlevée à ses parents dans le cadre de la rafle des années 1960 – une politique du gouvernement canadien selon laquelle les enfants autochtones furent enlevés à leur famille, à leur communauté et à leur culture pour être placés dans des foyers d’accueil d’où ils seraient adoptés par des familles blanches. Cette pratique s’inscrivait dans le prolongement du régime des écoles résidentielles, où les enfants autochtones étaient placés sous la protection de l’enfance, dans la plupart des cas sans le consentement de leur famille ou de leur bande. Les autorités gouvernementales de l’époque étaient généralement d’avis que les enfants autochtones pourraient recevoir une meilleure éducation s’ils étaient intégrés au système scolaire public. Les pensionnats autochtones, cependant, ont persisté comme une sorte de pensionnat pour les enfants dont les familles étaient jugées inaptes à prendre soin des leurs. Ce système, mis sur pied par le gouvernement canadien et administré par les Églises, avait pour objectif nominal d’éduquer les enfants autochtones, mais aussi des objectifs plus dommageables et tout aussi explicites de les endoctriner dans les modes de vie euro-canadiens et chrétiens, ainsi qu’à la société canadienne blanche dominante. Le système leur interdisait de reconnaître leur patrimoine et leur culture autochtones ou de parler leur propre langue. Les enfants étaient sévèrement punis si ces règles étaient violées. D’anciens élèves des pensionnats autochtones ont parlé des terribles abus physiques, sexuels, émotionnels et psychologiques subis aux mains du personnel de ces pensionnats.

Donovan

Donovan

« Universal Soldier » a été écrit et enregistré en 1964, alors que le gouvernement américain niait l’existence même d’une guerre au Vietnam. Il existe des preuves évidentes que la Maison-Blanche, le FBI et certaines stations de radio ont forcé à mettre sur la liste noire « Universal Soldier » et Buffy Sainte-Marie, mais un jeune artiste folk britannique du nom de Donovan (Leitch, né en 1946) a enregistré la chanson et elle est devenue, contre toute attente, un succès mondial. Non seulement la chanson a été accueillie avec mépris par toutes les factions belligérantes, mais l’enregistrement de Donovan ne présentait que lui chantant et jouant une guitare acoustique, à une époque où le rock ‘n roll et la radio pop devenaient de plus en plus vigoureux et plus électriques.

Buffy Sante-Marie se souvient d’une escale à San Francisco alors qu’elle voyageait du Mexique à Toronto où un groupe de médecins est entré à l’aéroport au milieu de la nuit, transportant des soldats blessés. Elle a demandé à l’un des médecins s’il y avait vraiment une guerre au Vietnam, malgré tous les démentis politiques aux États-Unis. Les médecins lui ont assuré qu’il y avait bel et bien une énorme guerre en cours. Sainte-Marie a commencé à écrire « Universal Soldier » à l’aéroport et dans l’avion, et l’a terminé au sous-sol du café Purple Onion à Toronto.

Les paroles de Buffy Sainte-Marie qui visent Hitler mentionnent Dachau, le premier camp de concentration construit par l’Allemagne nazie en 1933, responsable de 32 000 morts documentées et des milliers d’autres officieuses. Dans sa récitation, Donovan substitue cette référence à Liebau, un centre de formation où la jeunesse hitlérienne fut endoctrinée dans la culture nazie.

Richard au Festival de l'ail des bois, ca 1975

Richard au Festival de l’ail des bois, ca 1975

Pour ceux qui n’y étaient pas dans les années 1960, il est difficile d’imaginer l’antagonisme acharné des deux côtés de la guerre du Vietnam qui a défiguré et souillé tous les aspects de notre société. Les manifestations musicales ont été nombreuses, de « Eve of Destruction » de Barry McGuire à la magnifique « War » (What Is It Good For) d’Edwin Starr. John Lennon et Yoko Ono s’opposèrent rigoureusement à la guerre. Au cours de leur manifestation de 1969 à l’hôtel Queen Elizabeth à Montréal, Lennon a écrit et enregistré la chanson « Give Peace a Chance ». Sortie en 45 tours, elle est rapidement devenue un hymne anti-guerre chanté par un quart de million de manifestants contre la guerre du Vietnam à Washington. DC, le 15 novembre 1969, deuxième Jour du Moratoire sur le Vietnam. Plus tard en décembre, Lennon et Ono ont payé pour des panneaux publicitaires dans 10 grandes villes du monde qui ont déclaré, dans la langue nationale, « La guerre est terminée! Si tu le veux ».

En cette période traditionnelle de paix, l’Académie de Genève recense plus de 100 conflits armés en cours dans environ trois douzaines de pays, la plupart au Moyen-Orient, en Asie du Nord-Ouest et en Afrique subsaharienne.

Joyeux Noël à tous mes auditeurs.

Toutes les photos sont dans le domaine public.

Pour entendre la chanson, cliquez sur le titre ci-bas.

Richard Séguin – voix et guitare acoustique

Universal Soldier

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur « Universal Soldier » de Buffy Sainte-Marie

« Winin’ Boy Blues » de Jelly Roll Morton

Jelly Roll Morton

Jelly Roll Morton

Jelly Roll Morton (1890-1941) est né Ferdinand Joseph LaMothe dans la communauté créole de la Nouvelle-Orléans. Le mot « créole » désigne une personne de descendances mixtes françaises ou espagnoles et noires provenant des premiers colons français ou espagnols des États américains du golfe du Mexique et préservant leur langage et leur culture. Son père est parti quand il avait trois ans et quand sa mère a épousé William Mouton en 1894, il a pris le nom de son beau-père, l’anglicisant à Morton.

À un jeune âge, Morton apprend à jouer du piano et, à l’âge de 14 ans, se produit déjà dans les bordels du quartier de Storyville à la Nouvelle-Orléans, où il acquiert le nom de « Jelly Roll », un euphémisme pour les parties intimes d’une dame. La chanson « Winin’ Boy Blues » remonte à cette époque. À ce temps, le jazz fut aussi formé par des musiciens comme Buddy Bolden (1877-1931), Kid Ory (1886-1973), King Oliver (1881-1938) et Sidney Bechet (1897-1959). Jelly Roll Morton n’a peut-être pas inventé le jazz comme il le prétendait, mais tous conviennent qu’il était un pionnier très prédominant du genre.

Richard avec sa mandoline Eastman

Richard et sa mandoline Eastman

Lorsque la grand-mère de Morton a appris qu’il jouait la « musique du diable » dans des bordels, elle l’a renié pour avoir déshonoré le nom de LaMothe. Morton a commencé à tourner dans le sud des États-Unis, à travailler dans des spectacles de ménestrels et à composer une grande partie de son répertoire. En 1926, Morton signe avec la Victor Talking Machine Company, enregistrant jusqu’en 1931, date à laquelle son contrat d’enregistrement n’est pas renouvelé en raison de la Grande Dépression. Il a brièvement fait une émission de radio en 1934, puis a tourné dans un groupe burlesque. En 1938, Alan Lomax (1915-2002), ethnomusicologue américain surtout connu pour ses nombreux enregistrements de musique folklorique, invite Morton à enregistrer pour la Bibliothèque du Congrès. En raison de la nature suggestive de ces enregistrements, certains n’ont été publiés qu’en 2005 sous forme de 8 CD et deux livrets, une collection qui a remporté deux Grammy Awards en 2006 ainsi que des prix pour le meilleur album historique et les meilleurs notes d’un album.

Octave Amos (fiddle) and Stavin' Chain

Octave Amos (violon) et Stavin’ Chain (Wilson Jones)

Les séances ont duré plus de huit heures, Morton parlant et jouant du piano tout au long. Lomax s’intéressait aux jours de Morton à Storyville et aux chansons de l’époque. Lomax a enregistré une version longue et coquine de « Winin’ Boy Blues », mais heureusement, des versions plus convenables ont aussi été enregistrées par la suite. La chanson fait mention de « stavin’ chains », une expression ouverte à beaucoup d’interprétation. Dans un enregistrement de 1937 de Lil Johnson (lieux de naissance et de mort inconnus), Stavin’ Chain était le nom d’un ingénieur en chef dans un train qui possédait une grande force et une grande endurance. Le terme « stavin’ chains » peut provenir des chaînes utilisées par les fabricants de barils pour maintenir les portées de barils ensemble jusqu’à ce qu’une bande de fer puisse être installée autour de l’extrémité du baril. Une autre théorie est que « stavin’ chain » était le nom de la chaîne utilisée pour enchaîner les prisonniers par leurs chevilles. Jelly Roll Morton croyait que Stavin’ Chain était le nom d’un maquereau à la Nouvelle-Orléans, alors que Stavin’ Chain, aussi connu sous le nom de Wilson Jones, était un musicien de blues américain que Lomax a lui-même photographié et enregistré en 1934.

Peu après les enregistrements de la Bibliothèque du Congrès, Morton a été poignardé dans une bagarre avec un ami et a subi des blessures à la tête et à la poitrine. Un hôpital réservé aux Blancs a refusé de le traiter, la ville ayant des installations à ségrégation raciale à l’époque. Il a été transporté dans un hôpital noir à proximité où les médecins ont laissé de la glace sur ses blessures pendant plusieurs heures avant de le soigner. Sa guérison fut incomplète et par la suite, il était souvent malade et s’essoufflait facilement. Il a continué à souffrir de problèmes respiratoires quand il a voyagé à Los Angeles avec l’intention de relancer sa carrière. Il mourut le 10 juillet 1941, après un séjour de onze jours à l’hôpital du comté de Los Angeles.

Gabriel

Gabriel

Je pense à mon frère Gabriel (1936-1959) presque tous les jours mais surtout quand j’entends le son d’un piano d’un passé lointain, comme celui de Jelly Roll Morton. A une époque où tout le monde me traitait comme l’enfant que j’étais, Gabriel a insisté pour me traiter comme une personne et a pris le temps de m’enseigner, malgré notre différence d’âge de quatorze ans, le monde de la musique, tout merveilleux et adulte. Je ne jouerais pas sans lui.

Les photos de Morton et Jones/Amos sont dans le domaine public.

Pour entendre l’enregistrement, cliquer sur le titre de la pièce ci-dessous.

Richard Séguin – voix, guitare acoustique, mandoline

Winin’ Boy Blues

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur « Winin’ Boy Blues » de Jelly Roll Morton

« Just Like a Woman » de Bob Dylan

Richard et sa Stratocaster

Richard et sa Stratocaster

La chanson de Bob Dylan, « Just Like a Woman », est sortie dans le cadre de son album « Blonde On Blonde » en 1966. L’enregistrement de Dylan n’est pas sorti comme 45 tours au Royaume-Uni mais le groupe pop londonien Manfred Mann a enregistré et publié la chanson en Europe en 1966, atteignant le numéro 1 en Suède. Joe Cocker, Ricky Nelson, Rod Stewart et Richie Havens sont parmi les nombreux artistes qui ont couvert cette chanson.

Roch

Roch

La chanson a été largement critiquée pour ses paroles supposément sexistes ou misogynes mais c’était les années 1960. Tous ceux qui ont vécu cette décennie se souviendront sûrement que rien n’a échappé aux poings levés, aux bannières peintes, aux manifestations et aux cris d’individus vêtus de denim outrés par la guerre du Vietnam, le manque de droits des femmes, les inégalités raciales et à tout ce qui les a touchés de travers. À l’époque, je doutais de la sincérité de toute l’ère de la protestation, bien qu’elle était certainement à la mode et les jeunes ont toujours été esclaves de la mode. Je me souviens qu’au cours de ma première année à l’Université d’Ottawa, en 1968-1969, des jeunes ont pris le contrôle de l’édifice de l’administration et ont perturbé toutes les classes qui y avaient lieu. Les horaires révisés des cours ont été communiqués aux étudiants au moyen de messages dactylographiés agrafés aux poteaux téléphoniques, une stratégie de communication que l’Administration a oublié de mentionner aux étudiants. Par conséquent, j’ai manqué la moitié de mes cours, ignorant leur emplacement, et j’ai décidé que toute l’expérience universitaire n’était pas pour moi. J’ai démissionné avant la fin de ma première année. À ce jour, je n’ai aucune idée de ce qui avait tant dérangé ces manifestants. Depuis lors, j’ai toujours choisi la voie de la moindre résistance.

Otis Redding en 1967

Otis Redding en 1967

Mon arrangement de « Just Like a Woman » est fortement basé sur la série de ballades soul d’Otis Redding des années 1960, des chansons comme « I’ve Got Dreams To Remember », « These Arms Of Mine » et « I’ve Been Loving You Too Long ». Redding (1941-1967) avait un style de chant unique qui s’inspirait de la musique gospel qui avait précédé le « soul ». Otis Redding est décédé à l’âge de 26 ans dans un accident d’avion survenu le 10 décembre 1967, près de Madison, dans le Wisconsin, lors d’une tournée multi-ville avec son groupe, les Bar-Kays. Le trompettiste Ben Cauley fut le seul survivant de l’accident. Outre Redding, les autres victimes de l’accident furent leur valet, Matthew Kelly, le pilote Richard Fraser, ainsi que le guitariste Jimmy King, le saxophoniste ténor Phalon Jones, l’organiste Ronnie Caldwell, et le batteur Carl Cunningham.
(Image de Otis Redding – domaine public)

Richard Séguin – voix, guitares électriques, guitare acoustique, contrebasse électrique
Roch Tassé – batterie

Pour entendre la chanson, cliquez sur le titre ci-bas.

Just Like a Woman

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur « Just Like a Woman » de Bob Dylan

La balade anglaise « The Death of Queen Jane »

Jane Seymour par Hans Holbein the Younger

Jane Seymour par Hans Holbein the Younger

Jane Seymour (v.1508 – 1537), troisième épouse du roi Henri VIII, a été reine d’Angleterre de leur mariage en 1536 jusqu’à sa mort l’année suivante. Catherine d’Aragon, la première épouse d’Henri, n’avait pas réussi à produire un héritier mâle au trône, ce qui a conduit à son bannissement de la cour après que la demande d’Henri pour l’annulation du mariage ait été refusé par le pape Clément VII. En représailles, Henri VIII institua la Réforme anglaise où l’Église d’Angleterre se détacha de l’autorité du pape et de l’Église catholique. Henri a sanctionné la destruction complète de tous les sanctuaires des saints. Tous les moines dissidents ont également été exécutés. En 1542, les monastères restants de l’Angleterre ont tous été dissous, et leurs biens transférés à la Couronne.

Henri VIII s’est marié six fois et sa deuxième femme, Anne Boleyn, a fait trois fausses couches, tous des fils, et est tombée en disgrâce avec le roi. Henri commença à courtiser Jane Seymour et, pour l’épouser, il a dû trouver des raisons de mettre fin à son mariage avec Anne. Il a fait enquêter sur Anne pour haute trahison et elle a finalement été décapitée sur de fausses accusations d’adultère, d’inceste et de complot pour tuer le roi. Henry a ensuite été fiancé à Jane le lendemain de l’exécution d’Anne Boleyn.

Taylor

Richard et une de ses guitares Taylor

Le règne bref mais significatif de la reine Jane a mené à la naissance d’un héritier mâle, Edward VI, dans des circonstances très difficiles. La ballade anglaise « The Death of Queen Jane » parle de la mort de Jane Seymour après la naissance du prince Edward. La plupart des versions du chant se terminent par le contraste entre la joie de la naissance du Prince et la douleur de la mort de la Reine. Aucune preuve directe ne démontre exactement comment Jane Seymour a accouché, mais la vision populaire d’une naissance par césarienne est peu probable, quoique omniprésente dans les versions de la pièce. En général, on opérait seulement une mère déjà décédée, dans l’espoir désespéré de sauver l’enfant. On croit historiquement que le prince Edward est né naturellement et que sa mère a succombé à une infection et est morte 12 jours plus tard.

Francis James Child, domaine public

Francis James Child, domaine public

La chanson « The Death of Queen Jane » subsiste encore aujourd’hui en grande partie grâce à l’œuvre de Francis James Child (1825-1896). Child était un érudit, un éducateur et un folkloriste américain, surtout connu pour sa collection de ballades anglaises et écossaises maintenant connues sous le nom de Child Ballads. « The Death of Queen Jane » est la Child Ballad 170. La première apparition de la chanson semble être une publication appelée The Lamentation of Queen Jane, sous licence en 1560.

Dans la bibliothèque de Harvard, Child a accumulé l’une des plus grandes collections de folklore qui existent, a étudié des manuscrits plutôt que des versions imprimées de vieilles ballades, et a étudié des chansons et des histoires dans d’autres langues qui étaient liées aux ballades anglaises et écossaises. Son dernier recueil, intitulé The English and Scottish Popular Ballads, contient 305 ballades. Les mélodies de la plupart de ces ballades ont été recueillies et publiées par Bertrand Harris Bronson (1902-1986), professeur au département d’anglais de l’Université de Californie à Berkeley, dans et autour des années 1960.

Richard Séguin – voix, guitare acoustique, mandoline

Pour entendre la pièce, cliquez sur le titre de la chanson ci-bas.

The Death of Queen Jane

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur La balade anglaise « The Death of Queen Jane »

Les Ravens jouent « Queen Jane Approximately » de Bob Dylan

Richard

Richard

« Queen Jane Approximately » est une chanson de Bob Dylan tirée de l’album intitulé « Highway 61 Revisited », publié en 1965. L’autoroute 61 s’étend de la Nouvelle-Orléans, en Louisiane, jusqu’au Wyoming, au Minnesota, traversant tout le pays du nord au sud. L’autoroute est souvent appelée la Blues Highway en raison de sa longue histoire dans la musique blues, une partie de la route étant allongée sur le Blues Trail du Mississippi.

En 1965, j’avais déjà commencé à jouer de la guitare, tout comme deux de mes meilleurs amis, Martin Cunningham et Pierre Lafleur. Un autre ami, Roch Tassé, jouait de la batterie et joue toujours sur ce site. On a formé une orchestre qu’on a nommé les Ravens. Tous les quatre, nous étions habillés en noir – cols roulés noirs, pantalons noirs, bas noirs, souliers noirs. Plus de 50 ans plus tard, mes amis de jeunesse sont toujours mes amis. Des amis pour la vie.

Marty

Marty

Au fil des annés, il y a eu beaucoup de spéculations sur l’identité de la reine Jane, les options populaires étant lady Jane Grey, qui a occupé le trône d’Angleterre pendant 9 jours et a été décapitée pour trahison en 1553 alors qu’elle était encore adolescente; Jane Seymour, reine d’Angleterre et troisième épouse d’Henri VIII qui mourut en couches en 1537; et Joan Baez, chanteuse populaire des années 60 romantiquement liée à Dylan.

« Queen Jane Approximately » est l’une des nombreuses chansons de Dylan de l’époque qui comportaient des adverbes et d’autres qualificatifs dans leurs titres. Des exemples sont « Absolutyely Sweet Marie », « Obviously 5 Believers », « Most Likely You Go Your Way And I’ll Go Mine », « Positively Fourth Street » et d’autres. Dylan n’a jamais révélé la raison de cette préoccupation particulière.

Roch

Roch

En 1965 et 1966, Dylan a sorti trois albums qui allaient changer à jamais le visage de la musique contemporaine. « Bringing It All Back Home », « Highway 61 Revisited » et « Blonde On Blonde » ont constitué le cœur du meilleur travail de Dylan. Musicalement, il a collaboré avec les meilleurs musiciens de studio de Nashville ainsi qu’avec des dignitaires du rock et du blues de The Band et du Paul Butterfield Blues Band. Sur le plan lyrique, les mots venaient d’un autre monde, un qui a finalement été reconnue pour son éclat unique et qui a valu à Dylan le prix Nobel de littérature 2016. « Queen Jane Approximately » fait partie intégrante de cette production imposante qui rivalise et dépasse même celle de n’importe quel artiste dans n’importe quelle discipline.

Richard Séguin – voix, guitare électrique, contrebasse électrique
Martin Cunningham – guitare acoustique
Roch Tassé – batterie

Pour entendre la pièce, cliquez sur le titre de la chanson ci-bas.

Queen Jane Approximately

posted by R.A.Seguin in Non classé and have Commentaires fermés sur Les Ravens jouent « Queen Jane Approximately » de Bob Dylan